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Blog littéraire : A la découverte de mes écrits et mes coups de cœur ou de gueule.

Andrea Marcolongo Déplacer la lune de son orbite

Andrea Marcolongo Déplacer la lune de son orbite

Un livre qui interroge.

Avant d'entamer la lecture, ma réaction était mitigée : l'exercice de style qui consiste à trouver de quoi écrire sur une nuit passée dans un musée me paraît souvent artificiel. Bien sûr, là, il s'agissait d'Athènes et du nouveau musée de l'Acropole. Quand j'ai visité Athènes, il y a longtemps, je n'ai vu que l'ancien, l'infime bâtiment datant du XIXe siècle et qui, dès les années soixante-dix, se révélait bien trop étroit pour les richesses qu'il était destiné à révéler au public.

Au cours des décennies suivantes le projet de construire un nouveau musée fut maintes fois relancé. Mélina Mercouri notamment voulait y accueillir les fameux marbres du Parthénon enlevés par Lord Elgin et aujourd'hui encore exposés au British Museum. Ce nouveau musée a finalement été inauguré en 2009. Sur ces 25 000 mètres carrés Andrea Marcolongo a, bien évidemment, choisi de passer la nuit auprès des marbres du Parthénon.

Andrea Marcolongo Déplacer la lune de son orbite

Elle qui est l'autrice du livre "La Langue géniale. Neuf bonnes raisons d'aimer le grec" s'émerveille de côtoyer les vestiges d'un monument unique au monde, trésor légué par Périclès et qui révèle le génie de Phidias. Mais ce qui nourrit sa réflexion, ce sont les creux, le vide laissé par les parties manquantes : toutes les sculptures arrachées au XIXe siècle par un Britannique peu scrupuleux.

Des frises et métopes du Parthénon, que reste-t-il ? Des pieds, quelques bras, des museaux de chevaux... Des cortèges brisés les visages ont disparu, engloutis par le temps ou volés par l'avidité des hommes.

"Accroupie sur le sol devant ce qui reste de la frise orientale du Parthénon, je ne peux m'empêcher de penser à ce que dirait Phidias en voyant ses marbres réduits en pièces détachées, un pied à Athènes, une tête à Paris, un buste à Londres. Qui sait ce qu'en penseraient Périclès, le commanditaire des gigantesques travaux qui menèrent à l'érection du Parthénon, et tous les autres, de Platon à Aristote et jusqu'à Alexandre le Grand, en voyant ce massacre."

Alma-Tadema, Phidias montrant les frises du Parthénon à ses amis

Alma-Tadema, Phidias montrant les frises du Parthénon à ses amis

Andrea Marcolongo a emporté avec elle pour cette nuit particulière un livre, choix inattendu, presque sacrilège  : la biographie de Lord Elgin. Etrange fascination pour "le voleur, le pilleur" de la culture dont nous nous revendiquons héritiers. Un motif pour réfléchir à notre rapport avec ce que symbolise la Grèce : fascination et ingratitude. Dépendance et rejet. 

"Chaque fois que nous jugeons recevable la question "A quoi sert l'Antiquité?", refusant de voir que "servir" est le propre des serfs tandis que la culture nous libère, notre vue se brouille davantage."

Andrea Marcolongo Déplacer la lune de son orbite

L'autrice nous apprend aussi que la destinée de Lord Elgin fut frappée par la malédiction d'Athéna. Le rapt barbare qu'il avait accompli ne lui valut en fin de compte guère de considération de la part de ses compatriotes, aucun honneur politique, mais surtout il fut suivi de l'échec de son mariage, la perte de sa fortune et d'une forme de gangrène qui le défigura. Ironie du sort il dut entasser les marbres volés dans une grande maison louée à cette intention où il vécut seul entouré de ses trésors, fragments, inscriptions, sculptures, colonnes, chapiteaux se côtoyant au hasard.

"Si ce n'était pas l'histoire bien anglaise des marbres du Parthénon, ce serait une tragédie grecque."

Le coup de grâce lui fut porté par Lord Byron, qui avait déjà prophétisé son malheur dans « La malédiction de Minerve » en 1811, avec son ouvrage Le Pèlerinage de Childe Harold : « En l’espace de quelques mois, les vers de Byron, lus et traduits dans toute l’Europe, rendirent la paroles aux marbres volés par Elgin »

Andrea Marcolongo Déplacer la lune de son orbite

Pour terminer je laisse la parole à Andra Marcolongo :

"Face à l'intégrité de la Grèce, nous sommes tous comme les marbres abîmés de l'Acropole? Nous sommes des nostalgies."

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